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Établie au cœur du village dont elle ferme, du côté nord, la petite place, l’église Saint-Jean-Baptiste est un édifice assez modeste mais qui mérite cependant de retenir l’attention. Chapelle d’une sous-commanderie (ou plus exactement d’un « membre ») des Hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem (qui, en 1247 dépendait de la commanderie du Palais-sur-Vienne), mais également église paroissiale, détachée de celle de Vaulry, elle fut en partie reconstruite au milieu du XIIIe siècle. On conserva alors, semble-t-il, les murs latéraux d’une église antérieure, dont l’appareil, fait de moellons, est assez irrégulier, pour constituer une nef de deux travées dont les voûtes, sur croisées d’ogives, reposaient sur des chapiteaux portés par des colonnettes engagées, soutenues par des consoles en forme de têtes. Le chœur, à chevet plat, est, au contraire, construit en bel appareil de granit ; sa voûte sur croisée d’ogives – qui comportait, semble-t-il, à l’origine des liernes si l’on en juge par la forme de la clef (timbrée d’une croix de Malte ?) – conserve les restes d’un décor de faux-joints et retombe sur des colonnes assez minces, tandis que les supports de l’arc triomphal sont relativement plus importants ; l’emploi du granit donne au décor végétal des chapiteaux un aspect un peu archaïque. La baie orientale de ce chœur est d’origine ; la fenêtre latérale sud n’aurait été percée que dans la seconde moitié du XVIIe siècle.

L’église fit en effet l’objet, après 1655, de travaux importants, liés à la fois au mauvais état des voûtes de la nef et des maçonneries du mur gouttereau sud. La chute de la cloche entraîna la décision de démolir les voûtes, de les remplacer par un couvrement de bois et de reconstruire en partie le pignon occidental, en particulier le gros contrefort sud, ainsi que le clocher, dont les rampants sont curieusement ornés de petites sphères, et on restitua assez sommairement la partie droite du portail à double voussure et à chapiteaux disposés en bandeau (d’un type fort répandu en Limousin au XIIIe s.) dont seule la partie gauche avait été épargnée.

Par la suite l’édifice fit l’objet de quelques travaux, notamment au niveau du couvrement de bois de la nef, plusieurs fois réparé ou refait, et de sa toiture, assez fortement abaissée par rapport à celle du chœur. Les procès-verbaux des visiteurs, mandatés par le « Grand Prieuré de la Langue d’Auvergne », permettent de restituer les dispositions intérieures de l’église et, en particulier, les divisions du chœur et de la nef par un système de clôtures en bois. Ne subsistent de cet aménagement que les encoches correspondant à la fixation de la clôture principale, peut-être un élément de boiserie (du XVIe siècle ?), en réemploi dans le retable latéral nord et la petite porte, ouverte sans doute, dès l’origine, dans le mur nord de la nef, et qui permettait une communication directe avec le « manoir » des Hospitaliers.

L’église de Breuilaufa, bien insérée dans le paysage de ce village typiquement limousin, conserve ainsi le souvenir de l’importance qu’ont eue, dans cette région et dès le XIIIe s., les ordres militaires et, dans ce cas précis, celui des Hospitaliers. En témoignent la titulature relativement rare de l’église, dédiée à la « Décollation de saint Jean-Baptiste » et une statue en pierre décapitée de ce dernier saint, datant probablement du XVIe s., curieusement « restaurée » au XIXe s. à l’aide d’une tête barbue en bois qui pourrait être en fait un vestige du Christ attesté au XVIIIe sur le maître-autel.

Mais il faut bien reconnaître que si le nom de Breuilaufa est assez familier aux historiens de l’art médiéval, c’est essentiellement en raison de la présence dans cette église d’une statue de la Vierge assise, en cuivre doré, l’une des plus belles et des plus caractéristiques de la production de « l’Œuvre de Limoges » au milieu du XIIIe s., aujourd’hui en dépôt au Musée des Beaux-Arts de Limoges.

Pour participer à la réfection de la toiture, du clocher et d’une partie de la façade nord, la Sauvegarde de l’Art français a accordé un don de 5 000 € en 2011.

 

Jean-René Gaborit

 

 

 

Bibliographie :

 

  1. Laborderie, « L’excursion archéologique de 1928… L’église et le manoir de Breuilaufa », Bulletin de la Société archéologique et historique du Limousin, t. 73, 1930, p. 267-271.

J.-Fr. Boyer et V. Notin, « L’église hospitalière de Breuilaufa et ‘l’image de Notre-Dame en bronze doré, fort biau’ », Bulletin de la Société archéologique et historique du Limousin., t. 130, 2002, p. 55-97 (restitution des dispositions intérieures de l’église, reprise de R. Valentin, ibid., t. 75, 1935, p. 387).

 

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