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L’édifice, de plan rectangulaire sans transept, a une longueur totale de 29,5 mètres, si l’on inclut la sacristie. Il est en pierres de taille calcaire avec des ajouts de silex (cl. 1).

Dédiée à saint Martin, ce qui pourrait faire remonter sa fondation au haut Moyen Âge, l’église date du XVe s. mais a été remaniée, dans la partie du chœur, en 1786.

Cachée dans un vallon très boisé et pittoresque, l’église déçut grandement Arcisse de Caumont, qui l’a décrite comme une « mauvaise bâtisse, sillonnée de nombreuses lézardes, dont les parties les plus anciennes datent du dernier gothique » et dont « toutes les ouvertures ont été refaites au dernier siècle »[1]. On est aujourd’hui plus indulgent, d’autant que l’église est restée à peu près dans le même état qu’à l’époque de Caumont ; le « bel if » qui ombrageait le cimetière est devenu considérable (cl. 2).

Le clocher, à l’ouest, est en charpente, carré, avec une flèche octogonale ; du temps de Caumont[2], il était recouvert d’essentes, mais aujourd’hui d’ardoises. La charpente repose, à l’intérieur, sur des poteaux de bois, assis sur des bases en moellons. Malgré ce dispositif, le pignon a dû être renforcé par des contreforts aux deux angles (cl. 3).

Le chœur, composé de trois travées, présente cinq fenêtres (deux au nord et trois au sud) qui datent du XVIIIe siècle. Mais le pignon n’a jamais été percé pour recevoir des vitraux. La voûte est plus basse que celle de la nef, dont elle est séparée par une poutre de gloire métallique. Ce fut en effet la mode au XIXe s. de scier les entraits en bois ou de les remplacer par des tirants métalliques, qui ont généralement affaibli la structure, afin de dégager la vue sur le chœur et son retable (cl. 4).

Intérieurement, le chœur a reçu une décoration complète en plâtre, dont la date est donnée par une inscription sur la frise « Domine, dilexi decorem domus tuae[3] / F. Le Front, curé de La Croupte, 1786 ». Le registre des baptêmes de La Croupte consigne à la date du 19 décembre 1786 que « le cœur de l’église de St-Martin de la Croutte a été béni par Monsieur Levavasseur, curé de St-Aubin-sur-Auquainville, doyen de Livarot, en présence des soussignés »[4] (cl. 5). Néanmoins, le retable du maître-autel fut alors conservé ; il remonte au règne de Louis XIV. Il faut signaler particulièrement, sur le mur nord, un grand bas-relief en stuc polychrome, du XVIIe s., représentant la charité de saint Martin avec la formule classique Martinus adhuc catechumenus hac me veste contexit et la date de décès du saint, 397. Les stalles du chœur sont garnies des torchères de la confrérie des charitons, placés sous l’invocation de saint Fiacre[5].

Légèrement désaxée vers le nord par rapport au chœur, la nef est formée de deux travées. Les quatre fenêtres ont été agrandies au XVIIIe siècle. Les deux petits autels de la nef sont « insignifiants ». La voûte de la nef est en merrain ; Caumont l’a datée du XVe siècle. Sur deux des poutres qui supportent le clocher, il y a des blasons sculptés à plein bois, chargés de trois fasces ondées ; ils correspondent aux armoiries des Hautemer, seigneurs de Fervaques.

La sacristie, alignée sur le mur méridional du chœur, est de la fin du XVIIIe s ; ou du début du siècle suivant. On y entre, de l’extérieur, par une porte dans le chevet.

 À la fin du XIXe s., les peintures du XVIIIe s. furent recouvertes d’un badigeon de couleur chocolat, qui fut supprimé lors d’une restauration faite en 1980 grâce au concours du Conseil général du Calvados.

Le clocher a été refait en 1990 après une tempête. La toiture de l’église a été revue en 1995.

Depuis longtemps, des désordres étaient apparus dans la maçonnerie : à l’angle nord-ouest du chœur, dans les appuis de fenêtres abîmés par des barreaux rouillés, et surtout le mur sud, déversé, avait été consolidé en 1884 par deux « pilastres de renfort en brique grêlée » qui ne remplirent pas leur rôle puisqu’ils n’étaient pas engagés dans le mur (cl. 6).[6]

Des travaux de drainage, de restauration de la maçonnerie de la sacristie, des reprises de soubassements et d’appuis des fenêtres ont été exécutés et des vitraux incolores ont été mis en place. Pour participer à ces travaux, la Sauvegarde de l’Art français a accordé un don de 5 000 € en 2010.

Louis Le Roc’h Morgère

 

[1] Arcisse de Caumont, Statistique monumentale du Calvados, Caen, 1867, t. 5, p. 815-817.

[2] Le 27 mai 1868, le conseil municipal vota une somme importante pour renouveler la couverture du clocher et « prévenir ainsi les dégâts qu’occasionnerait la pluie tombant sur les pièces de bois principales de la construction » mais, le 30 décembre 1869, le Conseil demanda un secours au préfet pour réparer d’urgence la toiture « en remplaçant la vieille tuile usée par de l’ardoise qui chargera moins la charpente déjà bien vieille et bien affaiblie » et, le 30 octobre 1870, il paya Pierre Liard, couvreur à Fervaques, pour ses travaux (Arch. dép. Calvados, 556 Edt 1/1). Une grosse dépense fut faite à nouveau en mai 1877 pour réparer « une assez grande partie de l’église… découverte par un ouragan » ; le 20 décembre 1884, le Conseil fit renouveler 122 m² de toiture (556 Edt 1/2).

[3] Ps. 26, 8.

[4] Arch. dép. Calvados.

[5] Ce saint était réputé guérir diverses maladies de peau et l’on voit encore à proximité de l’église un enclos où restent attachés des linges de toilette.

[6]  Je remercie de leur concours MM. Lebeurier et Pivet de la Direction des Archives du Calvados.

 

Le projet en images