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L’église Saint-Barthélemy compte parmi les trop rares monuments élevés par Claude-Nicolas Ledoux qui ont bravé les épreuves du temps. Centre d’une châtellenie dépendant du comté de Tonnerre et siège d’un important bailliage, la paroisse de Cruzy-le-Châtel, mentionnée depuis le XIIe s., était placée pour son église sous le patronage de l’abbaye Saint-Michel de Tonnerre. De son passé médiéval, le monument conserve encore un long chevet du XIIIe s., constitué de deux travées rectangulaires puis d’une abside à trois pans ; l’ensemble est voûté d’ogives qui reposent, à mi-hauteur, sur une série de consoles en forme de colonnettes.

Le monument doit cependant sa renommée à l’intervention de l’un des plus célèbres architectes de la fin du XVIIIe siècle. C’est en effet au tout début de sa carrière, en juillet 1765, que Claude-Nicolas Ledoux, alors architecte des Eaux et Forêts de la maîtrise de Sens, fut chargé d’établir les devis pour la reconstruction de l’église, dont il suivit le chantier jusqu’en 1767. Le monument fut ensuite complété, en 1774, par son successeur, l’architecte Jacques-François Buron, oncle du peintre David, qui éleva un clocher au-dessus de la façade occidentale. La destruction de l’ancien clocher, en avant du chevet, lui permit également de prolonger la nef de deux travées supplémentaires, en direction de l’est, sur le modèle des précédentes.

En avant du chevet gothique qui fut conservé, l’édifice se compose d’une nef de sept travées –seulement cinq dans le parti primitif de Ledoux – et à trois vaisseaux couverts d’arêtes sur les bas-côtés. Comme nombre d’églises bâties dans la seconde moitié du XVIIIe s. et marquées par le retour à l’antique, le vaisseau central se caractérise par une voûte en berceau plein cintre, aveugle et portée par un entablement. Quant aux arcs doubleaux, ils se prolongent par de larges pilastres doriques plaqués contre les robustes piliers rectangulaires des grandes arcades. Afin d’accentuer ces effets de puissance et de simplicité qui convenaient parfaitement à un modeste édifice paroissial, de surcroît dédié à un apôtre, Ledoux supprima l’abaque des chapiteaux et la frise de l’entablement.

Pour la façade occidentale, à l’appareillage des plus remarquables, Ledoux s’inspira en revanche des grandes basiliques de la Renaissance italienne et, en employant un ordre dorique complet, il demeura fidèle aux canons classiques dont il chercha à s’éloigner par la suite. Cette façade comprend, au centre, un avant-corps constitué de deux paires de pilastres qui soutiennent un entablement et un fronton triangulaire. De part et d’autre, le mur s’anime de baies feintes et de tables rectangulaires dépourvues de sculptures ou d’ornements afin de s’accorder à l’esprit général de simplicité. Tout en trahissant la composition primitive de la façade, en lui conférant un élancement vertical, le clocher de Buron s’intègre sans trop de heurt à l’œuvre de Ledoux : les quatre pilastres qui flanquent la baie centrale viennent prolonger les rythmes de la partie inférieure.

L’église possède un orgue réalisé, dans la seconde moitié du XIXe s., par le facteur Paul Chazelle, installé à Avallon et qui fut particulièrement actif dans le département de l’Yonne.

Les travaux de restauration concernent la corniche et le fronton de la façade occidentale dont les pierres de taille ont été altérées par le gel, pour lesquels la Sauvegarde de l’Art français a versé un don de 20 000 € en 2008.

 

Philippe Plagnieux

 

Le projet en images