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Le village de Killem, en Flandre maritime, a été fondé au milieu du XIe s. dans un secteur de terres humides, drainées et rendues cultivables à l’initiative des religieux de l’abbaye Saint-Winoc, à Bergues. L’église Saint-Michel en occupe le centre, entourée d’un cimetière clos de haies.

Comme la plupart des églises de la région, celle-ci a été ruinée lors des guerres de Religion, plus précisément par les Gueuxdont les bandes armées ont ravagé le pays à partir de 1566, incendiant les sanctuaires et tuant les desservants. Le retour de la paix et de la prospérité, sous le gouvernement des archiducs – c’est-à-dire à l’époque d’Henri IV – en a permis la reconstruction, favorisée par l’autorisation donnée en 1610 de lever un impôt à cet effet.

Il s’agit d’un important édifice du type « hallekerk », devenu la règle générale dans la région à partir du XVesiècle. Ses trois nefs parallèles, de hauteur équivalente, sont séparées par deux files d’arcades. La reconstruction a été faite en briques claires, dites de sable,moulurées lorsqu’elles sont utilisées pour les arcatures et les remplages, et rehaussées de temps en temps par la présence de carreaux de pierre calcaire.

Le pignon central de la façade occidentale, haute de quinze mètres, conserve d’importants vestiges de maçonneries d’époque romane, faites de grès ferrugineux brun rougeâtre. Il s’agit de moellons grossièrement équarris, assisés et noyés dans du mortier. On reconnaît de part et d’autre de la porte actuelle les piédroits et les départs du cintre de la large porte romane. Á la partie supérieure, au-dessus de la grande fenêtre reprise en briques au XVIes., on distingue trois ouvertures rectangulaires, abritant chacune une colonne à chapiteau cubique. Au-dessus de celle du centre, plus haute, le motif triangulaire formé de six triangles imbriqués correspondrait à une représentation symbolique de la Trinité.

En l’absence de transept, les trois vaisseaux comptent trois travées de nef, une travée correspondant à la tour centrale, et deux travées de chœur terminées par un sanctuaire à trois ou cinq pans. L’église n’est pas voûtée, à l’exception de la travée formant la base de la tour centrale. Haute de 29 mètres, cette dernière est un puissant ouvrage de plan carré, surmonté d’une flèche polygonale en charpente. Son décor d’architecture, particulièrement soigné, consiste en une paire de grandes arcades au profil surbaissé, ornées de remplages simulés, une seconde paire de grandes fenêtres géminées, probablement reprises au XIXes., correspondant à l’étage des cloches, et une suite d’arcatures aveugles simulant une balustrade, au pied de la flèche. La présence de hautes arcatures analogues, sur les contreforts d’angle, contribue à l’élancement de la silhouette d’ensemble.

Ajoutée au pied du chevet, la petite sacristie se signale par son plan polygonal et son toit surmonté d’un petit bulbe.

Comme c’est généralement le cas en Flandre maritime, l’église abrite un remarquable mobilier des XVIIeet XVIIIes., en particulier cinq retables. Le maître-autel, au centre, s’inscrit sous une figure de saint Michel, dans un décor de pilastres blancs rehaussés d’or. L’un des retables latéraux s’organise autour des figures de la Vierge du Rosaire et de saint Dominique, placées dans une perspective feinte, encadrée de pilastres et de panneaux peints de deux tons de marbres simulés, sous une gloire logée dans le cul-de-four. Probablement réalisé à l’imitation de celui de Saint-Vaast d’Hondschoote, il est accompagné des statues de saint Thomas d’Aquin et de saint Jacques de Menavia. L’autel et le tabernacle ont dû être renouvelés au XIXes., et la restauration effectuée en 1995 a restitué à l’ensemble sa polychromie d’origine.

Placées de part et d’autre du sanctuaire et l’isolant des chapelles latérales, les stalles s’adossent à des lambris monumentaux, décorés de profils sculptés de personnages de l’Ancien et du Nouveau Testament. La table de communion est en fer ouvragé, et la chaire a conservé son abat-son à lambrequins et sa rampe décorée de panneaux ajourés, sculptés d’enroulements dans la tradition flamande.

Le buffet d’orgue, au revers de la façade, est animé de plusieurs personnages. Des lambris moulurés font enfin le tour de l’église, rythmés par des pilastres ornés de chapiteaux sculptés et dorés. Un dais de procession en bois sculpté, peint et doré, complète ce remarquable mobilier.

L’église a fait l’objet en 1854-1856 d’une importante campagne de travaux portant sur la consolidation des maçonneries de la tour, la réparation des charpentes et la réfection générale des couvertures.

Les travaux actuellement en cours sont du même ordre. Entreprise en 2007, la première tranche porte sur les maçonneries, charpentes et couvertures du clocher, du chevet et des trois nefs. La Sauvegarde de l’Art Français a fait un don, en 2007, de 10 000 € tandis que la Fondation Duprez-Mulliez a apporté son concours pour 15 000 €.

 

Philippe Seydoux

 

Bibliographie :

 

  1. Lotthé, Les églises de la Flandre française au Nord de la Lys, Lille 1940.

 

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