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L’église Saint-Blaise est située au centre du bourg rural du Cloître-Pleyben, commune voisine de Pleyben dont elle fut une trève[1] avant la Révolution. Le Cloître-Pleyben devint commune sous la Révolution puis paroisse après le Concordat. Si Pleyben, avec son célèbre enclos paroissial classé, est situé sur les grands circuits touristiques du département, l’église du Cloître, à l’écart, mériterait pourtant aussi une protection pour la qualité de son architecture et de son mobilier.

Le placitre[2] a perdu plusieurs de ses éléments d’origine : le mur d’enceinte, le cimetière (déplacé en 1943 au nord-ouest du bourg, ainsi que ses piliers d’entrée), l’ossuaire du XVIIe s. (qui a été démonté en 1952 et se trouve aujourd’hui reconstruit dans le cimetière de Plougastel-Daoulas, à 50 km au nord-ouest, près de Brest). Hors l’église, il ne reste que le calvaire, du XVIe s., dressé près de l’angle sud-ouest de l’église.

L’édifice lui-même a été édifié en plusieurs campagnes : le clocher porte la date de 1538, la nef est aussi du XVIe s., ainsi que la sacristie ancienne, construite en 1581 (date inscrite sur le linteau de la fenêtre) ; une nouvelle sacristie a été édifiée, à l’angle nord-est de l’église en 1734 (date inscrite sur le linteau de la fenêtre) ; le bras sud du transept a été reconstruit dans le premier tiers du XIXe s. ; le chœur, à l’origine à chevet plat, a été doté dans la seconde moitié du XIXe s. d’une abside à pans coupés, dits de style Beaumanoir[3].

Le plan de l’église Saint-Blaise est en forme de croix latine, avec une nef, deux bas-côtés, un transept, un chœur percé de cinq baies. Le clocher, encastré dans le mur occidental, est flanqué d’une tourelle d’accès cylindrique qui contient l’escalier et est surmontée d’un dôme à lanternon s’ouvrant sur la chambre des cloches entourée d’une galerie en encorbellement. La flèche, de plan octogonal, culmine à 24 mètres de hauteur ; elle est cantonnée de quatre pinacles à sa base, et les arêtes sont décorées de crochets à décor végétal ; le sommet se termine par un fleuron sculpté qui porte une croix et un coq. De nombreuses sculptures, figures animales ou humaines, décorent angles du clocher et crossettes.

L’église comporte deux entrées, l’une à l’ouest, au linteau en anse de panier, coincée entre deux solides contreforts, l’autre, également en anse de panier, ouvrant sur le porche sud traditionnel dans les églises de Bretagne ; une troisième porte, étroite, est percée dans le mur nord, près de l’ancienne sacristie ; une quatrième porte, au linteau en accolade, s’ouvrait près du transept ; elle est aujourd’hui murée.

À l’intérieur, la nef, dite de « type obscur[4] », comporte quatre travées ; les arcades sont soutenues directement – sans chapiteaux – par des piliers octogonaux. Une tribune occupe le fond de la nef : on y accède par l’escalier du clocher. La charpente de la nef et du transept est maintenue par des entraits dont les extrémités sont sculptées en forme d’engoulants. La voûte, lambrissée, est recouverte d’une peinture bleue qui a fait disparaître récemment les étoiles dorées qui l’ornaient. Les sablières sont décorées de figures humaines, de même que les blochets aux quatre angles de la croisée du transept et deux de la nouvelle sacristie.

Le mobilier est en grande partie du XVIIe siècle. L’ensemble du sanctuaire est délimité par une remarquable table de communion en chêne, à balustres en candélabre, qui enclôt non seulement le chœur mais aussi les autels du transept.

Le maître-autel (I.S.M.H.), composé d’un autel-tombeau orné de l’Agneau pascal, est surmonté d’un retable bas qui comporte un gradin sculpté de festons et d’arabesques sur lequel repose un tabernacle à quatre colonnettes torses encadrant les niches de saint Pierre et de saint Paul ; de chaque côté du tabernacle, deux tableaux représentant saint Marc et saint Jean sont surmontés de deux anges casqués ; au-dessus du tabernacle, un dais d’exposition porte le Christ en croix. L’ensemble date du XVIIe siècle.

Les deux retables latéraux (classés M.H.), dans les bras du transept, ont la même structure et peuvent être attribués à l’atelier Le Déan[5] : autel-tombeau, deux gradins à rinceaux, trois niches séparées par des colonnes à chapiteaux corinthiens, entablement à trois frontons fleuris. Dans le bras nord, trois statues en bois polychrome : au centre la Vierge conduisant l’Enfant Jésus (dite Notre-Dame de Lorette), de part et d’autre, saint Paul et saint Jean-Baptiste ; dans le bras sud, la Pietà est entourée de sainte Catherine d’Alexandrie et de sainte Anne avec la Vierge.

La statuaire comporte en outre plusieurs éléments anciens : du XVe s., une Vierge à l’Enfant (en pierre), une Vierge à l’Enfant emmailloté, un Christ en croix ; du XVIe s., un remarquable groupe de saint Yves entre le riche et le pauvre (classé M.H.) ; du XVIIe s., saint Blaise (Le Déan, 1672, classé M.H.) ; saint Michel terrassant le dragon, saint Joseph.

On notera encore une bannière de procession brodée (XVIIe s.), des objets d’orfèvrerie (XVIIIe s.), l’ancienne horloge mécanique (présentée au-dessous de la tribune). Les vitraux anciens ont disparu, remplacés par des verrières blanches (sauf dans le chœur où les verrières portent un décor végétal).

À l’extérieur, à proximité de l’angle sud-ouest de l’église, le calvaire du XVIe s. comporte une base monumentale à étage garnie de niches abritant les statues de saint Yves, du pauvre, du riche et d’une sainte femme. Le fût porte un croisillon à personnages (la Vierge et saint Jean) dominé par le crucifix et une Pietà.

Les travaux récents effectués sur l’église ont porté sur la restauration de la toiture et le traitement des bois, ainsi que sur des reprises de la maçonnerie du clocher. Pour y participer, la Sauvegarde de l’Art français a accordé un don de 14 000 € en 2012.

Tanguy Daniel

 

Bibliographie :

P. Peyron et J.-M. Abgrall, « Notices sur les paroisses du diocèse de Quimper et de Léon, Le Cloître-Pleyben », Bulletin de la Commission diocésaine d’architecture et d’archéologie, 1906, p. 77-80.

Y.-P. Castel, Atlas des croix & calvaires du Finistère, Quimper, 1980, p. 53.

R. Couffon et A. Le Bars, Diocèse de Quimper et de Léon. Nouveau répertoire des églises et chapelles, Quimper, 1988, p. 67.

B. Tanguy, Dictionnaire des noms de communes, trèves et paroisses du Finistère, Douarnenez, 1990, p. 54.

Le Patrimoine des communes du Finistère, Charenton-le-Pont, Éd. Flohic, t. II, 1998, p. 899-900.

[Légendes des illustrations]

Le Cloître-Pleyben (Finistère)

Église Saint-Blaise

  1. Plan (J. Furic, arch.)
  2. Vue générale depuis le sud-ouest
  3. Vue intérieure vers le chœur
  4. Autel et retable du bras nord du transept
  5. Autel et retable du bras sud du transept
  6. Groupe sculpté de saint Yves entre le riche et le pauvre

1. En Bretagne, le mot trève désigne une « succursale de la paroisse-mère, gouvernée par un kure (en français : un vicaire) sous l’autorité du person ou recteur de la paroisse, fonctionnant à l’instar de celle-ci, avec un territoire, une église tréviale avec fonts baptismaux et cimetière, registres » (chanoine J.-L. Le Floc’h).

2. Ce terme désigne le terrain, délimité par un mur d’enclos, sur lequel étaient construits l’église et différents éléments annexes : cimetière avec porte monumentale, calvaire, ossuaire, fontaine. La plupart des placitres ne comportent pas tous ces éléments : les chapelles n’avaient ni cimetière ni ossuaire.

3. Le « style Beaumanoir » est le nom donné traditionnellement aux églises ou chapelles comportant notamment une tour-clocher et un chevet à noues multiples composé de trois pans surmontés de frontons triangulaires. Le nom de Beaumanoir est celui d’une famille de maîtres d’œuvre dont l’atelier a été actif dans la région de Morlaix entre 1485 et 1535. Ce type de construction a été encore en vogue jusqu’au xixe s.

4. La nef, ne comportant pas de baies, n’est éclairée que par les fenêtres des bas-côtés.

[5]. Les Le Déan appartiennent à une famille de sculpteurs établis à Quimper et à Brest au XVIIe siècle. Ils ont produit un grand nombre d’œuvres, notamment des retables, pour des églises du diocèse de Cornouaille, dans les années 1660-1680. Jean, Yves et Pierre Le Déan ont sculpté le retable du maître-autel de la paroisse de Pleyben en 1667.

Le projet en images