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La chapelle Notre-Dame de Ponthouar est située en contrebas de la route qui va du bourg de Trégourez, dans les Montagnes Noires, à Quimper, siège du diocèse de Quimper et de Léon. Ce fut certainement un lieu de pèlerinage, si l’on en juge par les bancs de pierre qui subsistent le long des murs intérieurs de la chapelle, et les deux autels (ou tables d’offrandes ?) disposés dans la nef. Sans doute fut-elle très fréquentée, à la fin du Moyen Âge, pour que la richesse de son architecture et de sa statuaire soit encore manifeste aujourd’hui.

L’édifice actuel date de la seconde moitié du xve s. et du début du xvie siècle : en témoignent la base des piédroits de la porte occidentale et de la porte ouest du bras sud du transept (dont la forme est commune à la fin du Moyen Âge), le remplage en forme de fleur de lys de la baie du bras sud du transept et les armoiries qui subsistent dans les restes de la verrière de cette même baie. La fleur de lys est un rappel des mariages successifs de la duchesse Anne de Bretagne avec les rois de France Charles VIII et Louis XII et les armoiries de la verrière sont celles d’Yvon (ou Even) de Kerguz et de Catherine de Tréanna (qui vivaient au milieu du xve s.), celles de leur petit-fils, Olivier de Kerguz (docteur en droit, qui vivait dans le premier quart du xvie s.), ainsi que celles de sa femme Jeanne de Kergoët, dame de Kerstang.

Le plan est en forme de croix latine, avec une nef, flanquée au nord d’un transept, et un chevet plat en très légère saillie. Le mur occidental s’ouvre par une porte à accolade surmontée d’armoiries malheureusement martelées (qui confirment les hiérarchies seigneuriales dans la chapelle). La porte est flanquée de deux pinacles, et porte un petit clocher à flèche, auquel on accède par des marches aménagées sur le rampant sud. Deux portes latérales simples s’ouvrent au sud de la nef et à l’ouest du bras sud du transept ; deux fenêtres éclairent la nef, deux autres le bras sud du transept, une le bras nord : elles ont toutes gardé leur remplage ancien ; seule la fenêtre du chevet, plus récente, n’a pas de remplage.

À l’intérieur, la nef comprend quatre travées, la première étant murée pour former une sacristie logée dans la partie occidentale du bas-côté. Ce type de plan (une nef avec un seul bas-côté au nord) se rencontre dans plusieurs églises ou chapelles des environs : à Gouézec[1], à Pleyben[2], à Saint-Thois[3], à Édern[4], etc. Les arcades séparant la nef du bas-côté nord reposent sur des colonnes cylindriques à pénétration directe, sans chapiteaux. Les amorces d’un arc diaphragme sont visibles en haut de la nef : sans doute n’a-t-il jamais été construit. Quatre entraits à engoulants dans la nef, et un dans chaque bras du transept, consolident la charpente qui est recouverte d’un lambris. Les baies n’ont conservé que quelques vestiges des vitraux d’origine : la baie 4, notamment, outre les blasons de Kerguz, de Tréanna et de Kergoët, présente encore une Transfiguration remontant au quatrième quart du xve s., tandis qu’une sainte Véronique subsiste dans la baie 6 et une Annonciation dans la baie 8, ces deux dernières datant vraisemblablement de la fin du xve s. ou du début du xvie. L’ensemble de ces vitraux a été restauré vers 1970-1980 par le maître verrier Hubert de Sainte-Marie, de Quintin (Côtes-d’Armor).

Le mobilier, particulièrement la statuaire, est remarquable pour une chapelle rurale. Le maître-autel porte un retable en bois peint avec tabernacle ; il est surmonté d’un petit dais qui abrite le Christ en croix (actuellement en très mauvais état et déposé sur l’autel) ; le retable de l’autel du bras sud du transept est en pierre et garde quelques traces de polychromie : on y voit, en bas relief, le Christ crucifié, avec à sa gauche l’image d’un larron (certains l’identifient à un Christ aux liens) ; sur le mur nord du bras nord du transept, un prêtre portant un livre (qu’on a aussi interprété comme un Christ en majesté) a pu faire partie de ce retable qui aurait été mutilé. Trois statues du milieu du xvie siècle sont en grès polychrome, saint Maur en abbé mitré, saint Maurice abbé (du monastère de Clohars-Carnoët, dans le sud du Finistère), saint Guézennec (frère de saint Guénolé, le fondateur de l’abbaye de Landévennec), cette dernière statue portant la date de 1563. Les autres statues sont en bois polychrome : le Christ en croix sur la poutre de gloire (qui devait être accompagné de deux panneaux représentant la Vierge et saint Jean, aujourd’hui fixés sur les piliers du haut de la nef), une Vierge portant l’Enfant sur le bras droit et tenant une grappe de raisin de la main gauche (Notre-Dame de Ponthouar), saint Roch et son chien (culte lié aux épidémies), l’Éducation de la Vierge, groupe du xviie siècle. A noter que sainte Anne et la Vierge sont figurées debout.

On notera enfin les trois piscines aménagées auprès des autels, le bénitier placé près de la porte d’entrée sud dont un personnage tirant la langue soutient de sa tête et de ses bras la vasque sur laquelle a été sculptée la date de 1851.  La tribune adossée au mur occidental est un autre témoignage des prééminences seigneuriales ; la poutre qui la supporte est ornée de feuilles de vigne, de grappes de raisin, et d’un personnage (vigneron ?) qui s’empare d’une grappe.

Annexes de rigueur dans la plupart des chapelles bretonnes : dans le placitre, un calvaire du xvie s. implanté à quelques mètres au sud de la chapelle, avec un grand emmarchement à trois niveaux et un socle cubique ; son fût écoté est orné de consoles-mascarons où ne subsistent qu’une statue du Christ aux liens et un petit crucifix ; dans la prairie en contrebas de la route, une fontaine de dévotion construite au-dessus d’un bassin rectangulaire est voûtée en plein cintre.

 

Pour la consolidation de la maçonnerie, la réhabilitation de la flèche et la restauration de la toiture et du lambris, travaux menés en 2009 et 2010, la Sauvegarde de l’Art français a participé au financement a accordé une contribution de 18 000 € en 2010.

Tanguy Daniel

 

[1] Chapelles Notre-Dame des Trois-Fontaines, l’église paroissiale Notre-Dame de Tréguron, avant la construction d’un second bas-côté au sud, en 1830.

[2] Chapelle de La Madeleine.

[3] Chapelle de la Roche.

[4] Chapelles de Saint-Jean Botlan et Notre-Dame de Lannien.

Le projet en images