Vizille, Église priorale Sainte-Marie

Si Vizille  est  célèbre  par  son  château construit par le connétable de Lesdiguières au début du XVII^e s., puis par la réunion dans ce château des trois ordres du Dauphiné en 1788, son histoire com­mence plusieurs siècles plus tôt. En 993 ou 996, l’évêque de Grenoble, Humbert I d’Albon, donne à Cluny l’église Sainte-Marie de Vizille avec le bourg et la moitié du château. De longues contestations  empêchèrent Cluny d’en  prendre  possession jusqu’à la confirmation de ses droits par le pape Calixte II en 1119. La construction du prieuré a pu alors commencer. Pour l’église, il avait été prévu des dimensions assez vastes, rares dans la région. Le plan comportait trois nefs, d’au moins quatre travées, séparées par de grandes arcades en plein cintre, prenant appui sur des piliers rectangulaires élancés, couronnés par des impostes moulurées en doucine qui rap­ pellent le parti adopté à Saint-Pierre de Vienne. L’ensemble est construit en moyen appareil de tuf alors que les murs gouttereaux et la façade sont en moellons irréguliers liés par des joints épais de mortier. Dès le XV^e s., le déclin du prieuré amène un manque d’entretien qui s’aggrave après les Guerres de Religion. En 1572, il n’ y a plus de religieux et l’église, qui servait de paroisse, est presque entièrement détruite. Malgré les demandes réitérées des évêques de Grenoble au cours du XVII^e s., les habitants de Vizille préfèrent agrandir, puis reconstruire en 1785 la chapelle des Pénitents, située au centre du bourg. Les matériaux du chœur du prieuré sont alors récupérés. Actuellement, seuls quelques éléments conservés sur place en  proviennent : un pilastre  à cannelures,  un chapiteau.

En 1994, aucune réparation n’avait été faite jusqu’alors, et les dégradations étaient telles que les murs subsistants, la partie méridionale de la nef et les deux tiers de la façade occidentale menaçaient ruine.

Dans cette façade alors menacée s’insère un superbe portail caractérisé par la perfection de son appareil bichrome et l’exceptionnelle qualité de son décor sculpté. L’hypothèse de M. Victor Lassalle, conservateur des Musées de Nîmes, est que le sculpteur avait travaillé auparavant sur le chantier de Saint­Trophime d’Arles. Ce portail, unique dans la région, a été classé Monument historique en 1906. Mais le danger d’effondrement de l’édifice dont il est partie inhérente, posait un grave problème. Le Conseil municipal de Vizille avait envisagé la dépose du portail et son transfert dans un musée. Cette solution avait déjà été préconisée en 1855 au profit de l’église Saint-Laurent de Grenoble mais repoussée par la municipalité d’alors. Le projet a été rejeté par M. J.-L. Taupin, architecte des Monuments historiques ; la restauration de la chapelle était alors  acceptée.

Il fallait donc, de coure urgence, étayer les murs, mettre sur cintre la dernière arcade et installer une couverture provisoire en tôle ondulée. La Sauvegarde de l’Art Français a accordé une subvention de 60 000 F en 1994 pour ces interventions d’urgence.

E. C.