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L’église Saint-Étienne, aujourd’hui paroissiale, était à l’origine celle d’un prieuré de chanoines réguliers dépendant de l’abbaye voisine de Saint-Amant-de-Coly. Elle est citée dans une charte de 1168.

Établie sur une forte pente, à la frange d’un village pittoresque aux toits de lauzes, Saint-Étienne d’Archignac présente un plan simple d’église romane, très lisible en dépit de quelques modifications plus récentes, à savoir une nef lambrissée depuis l’origine, suivie d’une travée sous clocher sensiblement carrée et d’un chœur se poursuivant en abside sans solution de continuité. Au sud de la nef est adossée une chapelle gothique de deux travées aux contreforts d’angles obliques. Le chevet semi-circulaire remanié, sans autre décor qu’une corniche à modillons sculptés et deux contreforts s’interrompant à des niveaux différents, est bâti en moyen appareil allongé de grès ocre et rose. Sur les cinq fenêtres qui l’éclairent, les deux qui subsistent de l’époque romane sont de simples meurtrières que coiffe un linteau échancré d’un petit plein cintre, ébrasées seulement vers l’intérieur.

Caractéristiques, en principe, du premier art roman de l’Ouest, elles peuvent n’être ici qu’une survivance archaïsante qui s’est poursuivie au XIIe s., comme il s’en trouve beaucoup en Périgord, principalement dans le Sarladais, mais aussi en Agenais et en Quercy. Les trois autres fenêtres ont été agrandies, principalement celle de l’axe, dont la structure géminée n’offre rien de médiéval. Les modillons de style cubiste, autre signe d’archaïsme – avec la même réserve que pour les fenêtres – sont variés, avec un ou deux masques humains ou animaux, des tonnelets, une tête de chèvre. Certains sont refaits, d’autres nus.

La travée sous clocher est éclairée au sud par une belle fenêtre du XIIe s., sa porte nord en plein cintre a été obturée. Le clocher est carré. L’étage des cloches a été anciennement rebâti. Le mur nord de la nef, en grès portant des traces d’incendie, est totalement aveugle. Il a été remonté tardivement. Une césure franche, de haut en bas, le sépare d’un gros massif carré qui lui a été ajouté au XVIIe siècle. Ce massif est coiffé d’une toiture à quatre pans ; celle de la nef, qui lui fait suite, est à deux versants ; le clocher porte lui aussi un pavillon pyramidal précédant le toit conique de l’abside. Le tout, bien restitué en lauzes, donne, par ses divers décrochements, un charme singulier à l’ensemble de l’édifice.

C’est lorsqu’on prolongea la nef de l’épaisseur du massif occidental qu’on transporta sur le côté sud de ce dernier le portail roman qui la fermait à l’ouest. Des traces de ce transfert sont visibles, en particulier sous la forme d’une métope rectangulaire timbrée d’un quadrupède en bas-relief et d’un masque humain assez fruste, ancien modillon remployé dans l’angle, vestiges d’une corniche non rétablie. Le portail proprement dit, largement ébrasé, comporte trois larges voussures peu profondes en plein cintre que soulignent des couvre-joints toriques, et une archivolte moulurée. Les colonnettes qui les reçoivent ont des chapiteaux d’une forme géométrique qui témoignent de l’intervention sans génie d’un maçon plus récent. La paroi occidentale du massif n’est percée que d’une petite meurtrière romane cintrée, remploi ou imitation dans l’esprit de celles de l’abside.

À l’intérieur, le massif occidental ne se distingue en rien de la nef qui le prolonge, plafond à solives compris. Le mur sud, après le portail, est percé de deux grandes baies en arc brisé ouvrant sur une chapelle à deux travées de voûtes d’ogives, et dont le soubassement, d’une mouluration prismatique aussi complexe que savante et d’une grande qualité d’exécution, correspond au XVe s., et non à la date de 1607, signalée par le chanoine Brugière, qui peut indiquer une réfection partielle après le passage des huguenots. Les nervures des voûtes retombent sur des colonnettes interrompues à mi-hauteur par des culots sculptés de têtes d’hommes et de femmes d’une facture assez banale.

À la suite de la nef ont été montées quatre paires de dosserets épais disposés en angle droit, couronnés d’un bandeau en cavet décoré qui ne fait pas retour sur les côtés, autre trait archaïsant. Ils supportent non une coupole sur trompes, comme on pourrait s’y attendre, mais une voûte en arc-de-cloître en moellon reposant sur un bandeau biseauté à décor fruste, probablement refaite au XVIIe s. en même temps que le clocher. Ces dosserets étaient faits pour supporter quatre arcs en plein cintre, mais l’arc occidental a été repris avec deux chapiteaux aplatis à feuillage médiocre, peut-être au XIIIe s., et, dans l’angle intérieur des deux dosserets orientaux, on a monté deux colonnes adossées portant chacune un chapiteau allongé au décor végétal roman de qualité. La face orientale de la travée soutient ainsi deux arcs en plein cintre superposés qui signalent l’entrée du chœur. Une légère arcature à fûts minces et chapiteaux coniques, dans laquelle s’inscrivent les ébrasements des fenêtres, décore l’abside qui a perdu malheureusement son enduit. Un chanfrein simple souligne le départ du cul-de-four.

Une qualité architecturale rare se dégage de ce simple édifice rural. Les teintes du matériau, l’heureuse discrétion apportée aux modifications successives, la savante diffusion de la lumière, la qualité de la restauration font qu’il s’intègre parfaitement au village dont il est le plus bel ornement.

Le mobilier ancien a disparu. Dix-sept panneaux peints en différents tons de terre, dus à l’artiste contemporain Marcel Deviers, sont consacrés à la vie du Christ. Un crucifix de taille plus imposante complète la série, au sud, sous le clocher. Une Vierge à l’Enfant dorée placée sur l’autel de la chapelle gothique a été donnée en 1863 par l’impératrice Eugénie.

La Sauvegarde de l’Art français a accordé 9 000 € en 2005 pour la restauration de la tour occidentale : maçonnerie, charpente, couverture en lauzes.

Pierre Dubourg-Noves

 

Bibliographie :
Chanoine H. Brugière, L’ancien et le nouveau Périgord (manuscrit), s.d., t. 29, p. 207.
C. Lacombe, « Découverte de fragments de statues médiévales dans l’église d’Archignac (Dordogne ) », Société d’art et d’histoire de Sarlat et du Périgord Noir, n° 62, 1995, p. 115-123.
C. Lacombe, « Manifestation d’anticléricalisme révolutionnaire à Archignac », ibid., n° 63, 1996, p. 148-152.

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