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La légende veut que saint Amans, archevêque de Bordeaux au début du Ve s., fit halte pour baptiser des chrétiens et qu’une source jaillit miraculeusement au lieu où coule aujourd’hui une fontaine qui porte son nom. L’église Saint-Amans, grand édifice reconstruit bien après la fin de la guerre de Cent Ans, est située en dehors de l’enceinte fortifiée de la bastide. Siège de l’une des vingt-huit juridictions de la vicomté de Bruilhois mentionnées au XVIIe s., Bruch était une place importante. Son castrum figure dans un hommage rendu au comte de Toulouse en 1249, et en 1286, c’est au roi d’Angleterre que revient l’hommage pour le château. Monluc loge ses troupes à Bruch et aux alentours en juillet 1562 et défait à Feugarolles les forces huguenotes du sire de Douazan. De nouvelles tensions se manifestent, notamment en janvier 1570, au passage de l’armée des Princes commandée par l’amiral de Coligny. Beaucoup plus tard, en 1652, le séjour des troupes royales provoque encore d’importants dégâts.

Rebâtie avec la contribution du prieuré voisin du Paravis, de l’ordre de Fontevraud, dans les années 1520 (les sources écrites situent les premiers travaux en 1523), l’église associe les styles gothique tardif (fenêtres) et Renaissance (portail). Le plan à nef unique (26 m sur 9) flanquée de chapelles latérales, elles-mêmes voûtées d’ogive, tout comme le chœur, le chevet pentagonal, incitaient Georges Tholin, en 1874, à élire cet édifice pour « modèle » du groupe méridional d’églises gothiques de l’Agenais qui, comme celles de Villeneuve, Saint-Hilaire-d’Agen, Lamontjoie, Damazan, Laplume ou Francescas, comportent une nef dépourvue de transept et un chevet pentagonal ou plat (plus rarement à trois absidioles). Des sculptures ornent les chapiteaux et les culots destinés à recevoir les retombées des ogives. Ce foisonnement rond et trapu de feuillages gras, d’anges en buste ou en vol tenant phylactères ou clochette, de têtes humaines, de dragons, de monstres divers et d’animaux hybrides, reflète un XVIe s. assez grossier. Le portail Renaissance avec pilastres, entablement, fronton à niche et médaillons, placé sous le porche, n’en a ni la verve ni la grande maladresse.

Une statue de la Vierge, en bois (XVIe s.), se loge dans la niche centrale, protégée par une grille de fer forgé.

Quand l’avocat Jean-François Samazeuilh, en 1862, signale l’église de Bruch comme « mérit[ant] aussi d’être visitée » avec la porte de ville « dont la construction remonte à l’occupation anglaise », « [elle] n’offre que des naissances de voûte ». Les ogives des quatre travées de la nef remontent en effet à la fin du Second Empire (1867) et furent installées sous la direction de Léo Courau (mort en 1886), architecte à Bordeaux ; on réalisait ainsi les projets restés sans suite depuis le XVIe siècle. Pour parvenir à ce résultat, il fallut cependant procéder à l’exhaussement des murs et de la couverture, ce qui rendait le clocher-porche de 1615 à base rectangulaire, au sud-ouest, insuffisamment élevé. Son rehaussement fut à son tour entrepris ; il était achevé en 1893, sur des plans de l’architecte A. Courau. Trois cloches y ont pris place, dont celle de l’église détruite de Niolles, portant la date de 1594.

Hormis quelques peintures de la première moitié du XIXe s. (Le Christ au jardin des Oliviers, Saint Luc et Saint Joseph et l’Enfant Jésus) ou du milieu de ce siècle (Sacré-Cœur), l’essentiel de la décoration et du mobilier s’est constitué après 1870. Seize verrières peintes garnissent les fenêtres de l’édifice, illustrant les thèmes suivants : Visitation, Nativité, Annonciation, Présentation au Temple, ainsi que le Christ, Dieu le Père et le Saint-Esprit dans le chœur ; saint Joseph et l’Enfant Jésus, Notre-Dame des Victoires, la Croix, le Suaire et le sablier, la Vierge, l’ange gardien dans les chapelles latérales ; s’y ajoute en 1872 un jeu de verrières décoratives aux fenêtres hautes de la nef. Ces œuvres ont été commandées à Goussard, peintre-verrier à Condom. On a lambrissé le chœur en 1897-1898 de chêne sculpté dans un style néo-gothique. Cinq autels de marbre blanc, trois retables de bois peint, les confessionnaux, les clôtures de chapelle et celle du chœur, ainsi que la chaire de marbre veiné (Toulouse 1903), le luminaire et les nombreuses statues de plâtre marquent encore cette reprise en main complète de l’édifice et son aménagement liturgique à la fin du XIXe s. et dans les premières années du XXe.

Pour la réfection de la charpente et de la couverture de la nef et du chœur, et la restauration des glacis sous le fût du clocher et en pied de flèche, la Sauvegarde de l’Art français a accordé une aide de 12 000 euros en 2006.

Paul Mironneau

 

Bibliographie :

Service régional de l’Inventaire d’Aquitaine : Inventaire topographique, notices d’H. Mousset, J.-Ph. Maisonnave, 1997-1999 (accès en ligne).

G. Tholin, Études sur l’architecture religieuse de l’Agenais, Agen, Michel–Paris, Didron, 1874, p. 241-242.

J.-Fr. Samazeuilh, Dictionnaire géographique, historique et archéologique de l’arrondissement de Nérac, Nérac, 1881, p. 512 (1re éd. 1862 ; réimpr. Toulouse-Nérac, 1982).

Fr.-L. Depoutot, « Bruch et le Brulhois », Les Amis des Côtes de Buzet, printemps 1971, n° 15, p. 5-20.

J. Gardelles, Aquitaine gothique, Paris, 1992, p. 179.

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