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L’église de Saint-Julien de Malmont est isolée au milieu des collines et des bois, entre un presbytère et une maison. Elle fut avant 1801 annexe de celle d’Arjac, à 2 km de là, à vol d’oiseau. Mais le seigneur de ce nom faisait sa résidence au Cayla, non loin de Saint-Julien. Ce choix est d’ailleurs surprenant, car le site du Cayla ne paraît pas avoir eu les avantages de celui d’Arjac, dans la vallée du Dourdou. Le château est sans doute à l’origine de l’église de Malmont. Les seigneurs qui se succédèrent portèrent les noms d’Arjac, puis de Solages d’Arjac, après 1668 de Tullier, de Goudal de Curlande et, enfin, en 1774 de Balsa ou Balsac.

L’église de Saint-Julien fut peut-être à l’origine une chapelle seigneuriale, mais elle eut très tôt une fonction paroissiale. Lors de la reconstruction, au XVIe s., du chevet et du transept, ce dernier constitué de deux chapelles, seule celle du sud, signalée par des armoiries que nous essaierons d’identifier, pourrait avoir été affectée à la famille seigneuriale. S’agit-il de la chapelle dite de Selgues, du nom d’un domaine rural des environs, qui aurait été fondée en 1517 ? Ou bien ce titre était-il celui de la chapelle nord ? Le fondateur n’est pas nommé. En 1739, selon le compte rendu d’une visite épiscopale, ces deux chapelles n’étaient déjà plus desservies. Logiquement, le reste de l’église aurait été construit, selon l’usage, le chœur aux frais du prieur d’Arjac et la nef aux frais des paroissiens. Arjac et Saint-Julien formèrent d’abord un prieuré simple. On le divisa en 1562 en prieuré et cure : le curé et son vicaire assurèrent alors le service des deux églises. Le procès-verbal de 1739 fait état de l’existence de fonts baptismaux et d’un cimetière, mais les baptêmes, les mariages et les sépultures étaient toujours notés sur les registres d’Arjac. Le curé et la population obtinrent en 1763 qu’il y ait un vicaire résidant. C’est alors que l’on construisit le presbytère dans le prolongement de la nef. Après le Concordat de 1801, Saint-Julien fut érigé en paroisse autonome.

Essayons maintenant de faire parler les pierres. Nous sommes dans le vallon de Marcillac où la roche dominante est un grès rouge qui se prête assez bien à la taille. De la première construction il ne resterait qu’une partie de la nef, avec un mur sud bâti en moyen appareil, mais sans élément d’architecture caractéristique. Qu’il y ait eu à l’origine une voûte, cela est peu probable, au moins au premier regard : on aurait en effet conservé les contreforts en même temps que les murs. Quant au déversement de ces derniers, il semble être seulement le fait de fondations mal assurées. La tradition parle d’un incendie provoqué en 1568 par les protestants. Celui-ci pourrait avoir endommagé la charpente de la nef et le clocher. On suppose que le plafond actuel a été placé vers 1763. Le chœur, la croisée du transept, sur laquelle s’élève le clocher, et les deux chapelles qui constituent les bras du transept sont tous les quatre de plan carré et voûtés d’ogives. Les ogives qui partent des quatre piliers porteurs s’élancent de ces derniers sans rupture, selon le style du début du XVIe siècle. Le chœur est décoré d’une niche-retable avec arc en accolade. La clé de voûte est ornée du monogramme IHS aux lettres entrelacées. Des bancs de pierre ont été établis le long des murs latéraux. La chapelle sud renferme également une niche-retable avec arc en accolade, un banc de pierre lui faisant face. Les armoiries du fondateur, à trois fasces (parfois quatre), sont reproduites avec insistance – sept fois – dans la pierre ! Deux au retable, deux sur les piédroits de la piscine, une à chaque culot du mur sud, une à la clé de voûte[1].

La construction du clocher, entreprise après les guerres de Religion, au début du XVIIe s., paraît avoir été improvisée par le maçon sans une juste appréciation de la structure sous-jacente. Il est en effet de forme barlongue et établi sur une croisée carrée ! Si ses murs est et ouest reposent normalement sur les arcs doubleaux, les murs sud et nord s’appuient sur les voûtains des deux chapelles, bien moins résistants. Au fil du temps, le poids des murs a provoqué des fissures dans les voûtains ainsi que dans le clocher et dans l’escalier à vis. Par effet collatéral, la chapelle sud a bougé au point que l’on a dû retenir un de ses angles par un contrefort épais et disgracieux. La chapelle nord n’était pas dans un meilleur état. Il y avait urgence à corriger le défaut de construction du clocher et à endiguer l’affaissement des deux chapelles.

Les XIXe et XXe s. n’ont rien ajouté de notable, à part des vitraux, d’ailleurs ordinaires, offerts par le sénateur Delsol (1827-1896), alors propriétaire du château du Cayla. On a malheureusement détruit, dans la deuxième moitié du XXe s., l’oratoire du cimetière, couvert d’une toiture à quatre pentes ; il se trouvait en face de l’église et abritait une croix de calcaire sculptée (M.H.), figurant d’un côté le Christ entre la Vierge et saint Jean, de l’autre la Vierge entre saint Antoine ermite et un personnage non identifié. Elle a été réinstallée près de l’auvent qui sert de porche à l’église ; l’envers du calvaire est malheureusement exposé aux intempéries et se dégrade.

La Sauvegarde de l’Art français a apporté, en 2010, une aide de 8 000 € pour le recentrage des charges du clocher, la restauration de la chapelle nord (pignon, charpente et couverture) et de l’escalier à vis du clocher.

Jean Delmas

 

[1] Les Arjac, seigneurs au début du XVIe s., portaient « D’azur, au pairle d’argent, accompagné en chef d’une molette d’éperon d’or ». Ce qui interdit tout rapprochement. En revanche, les armoiries à trois fasces seraient plutôt celles des Adhémar/Azémar, qui étaient seigneurs de Firmi, à 7 km environ à vol d’oiseau. L’un d’eux était-il possessionné dans la paroisse ? On note une alliance entre Jacques d’Azémar, seigneur de La Roque-Rocozel, et Jeanne d’Arjac du Cayla, mais ce mariage eut lieu vers 1555, trop longtemps après la date supposée de la chapelle. Celle-ci garde donc encore son mystère.

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