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Église Notre-Dame de Saulseuse. En 1118, Richard, fils du seigneur de Tilly, fonde dans sa paroisse, sur le plateau du Vexin normand, une petite communauté de chanoines augustins qui s’installe à proximité du village, dans un lieu appelé Saulseuse (« le lieu où poussent les saules »). Les aumônes affluent rapidement de la part des seigneurs voisins et une première chapelle est édifiée en 1170. L’archevêque de Rouen, Eudes Rigaud, constate, lors de ses visites entre 1250 et 1260, que la communauté comprend douze moines, plus quelques convers et converses. Les revenus du prieuré permettent, sans doute au début du XIVe s., de construire une nouvelle chapelle, dite « église priorale », reliée à un ensemble de bâtiments, les uns à vocation religieuse, les autres à usage agricole. Au XVIIIe s., la partie agricole est affermée à un laboureur de Tilly, tandis que le prieuré lui-même périclite et que le nombre de religieux se réduit à quelques unités. En 1770, l’archevêché de Rouen décide de réunir le prieuré au séminaire Saint-Nicaise de Rouen et d’en abandonner les bâtiments au prieur-commendataire, qui reçoit l’autorisation d’effectuer des démolitions pour construire un logis plus vaste. C’est sans doute à partir de 1776 que la nef de l’église priorale est abattue. Vendu comme bien national à la Révolution, l’ensemble est transformé en exploitation agricole, l’église servant de silo. Fragilisé par ces mutilations successives, le prieuré de Saulseuse souffre des combats de l’été 1944 : une batterie allemande de DCA installée au sommet de l’église provoque l’effondrement partiel du bras sud du transept, tandis que les bombardements détruisent une partie de l’ancienne grange dîmière.
Du vaste édifice d’origine (45 m de long sur 10 de large), construit en pierre calcaire, sont parvenus jusqu’à nous le chœur, le transept et la salle nord dite « salle capitulaire ». Le chœur, à deux travées et trois pans coupés, est soutenu à l’extérieur par des contreforts, l’espace compris entre ces contreforts étant intégralement occupé par de vastes fenêtres, autrefois à remplages. Des faisceaux de minces colonnettes séparent les travées et supportent les nervures des voûtes. L’arc triomphal, séparant le chœur du transept repose sur d’élégants culots sculptés. Car l’édifice actuel, bien que mutilé, reste remarquable par le soin qui avait été apporté à sa construction et à sa décoration : de nombreux motifs décoratifs (frises, coquilles, feuillages…) ornent les éléments de structure (colonnes, chapiteaux, culs-de-lampe, clef-de-voûte…) ; on y retrouve les thèmes habituels : Dieu le Père, anges musiciens, ange à l’écu, le prophète Isaïe, mais aussi des sujets populaires et des animaux fantastiques.
Inscrite au titre des Monuments Historiques en juillet 2000, l’église du prieuré de Saulseuse a pu bénéficier d’un plan de restauration. Les travaux réalisés en 2005 ont permis d’en restaurer deux parties architecturalement déterminantes : l’arc oriental et les contreforts. Sur la part restant à la charge du propriétaire, la Sauvegarde de l’Art français a versé 6 000 €.

Lionel Dumarche

Bibliographie :
Arch. dép. Eure : H 1009, titres et baux, XVIIe-XVIIIe s. – III F 226, notes et croquis de Louis Régnier, vers 1893. – III Pl 617, plan cadastral, 1836.
Arch. dép. Seine-Maritime : G 1738, procès-verbaux de visite du prieuré, 1758 ; exhumation des sépultures, démolition des bâtiments conventuels et de la nef, 1775-1776. – G 9267-9271, réunion du prieuré au séminaire de Rouen, inventaire de biens, visite des bâtiments, 1770. – II B 384, n° 2479-2482, déclarations de temporel, 1675 à 1720.
D.R.A.C. Haute-Normandie, Centre régional des monuments historiques : dossier de recensement au titre des monuments historiques, 2000.
Service régional (Haute-Normandie) de l’inventaire général : dossier, 1976-1979.
Du Monstier, Neustria Pia, Rouen, 1663, p.846-847, notice « Saulceuse ».
Dom T. Duplessis, Description géographique et historique de la Haute-Normandie, Rouen, 1740, t. 1. p. 310-311 et 587-588 (réimpr. Brionne, 1971).
A. Le Prévost, Mémoires et notes pour servir à l’histoire du département de l’Eure, éd. par L. Delisle et L. Passy, Évreux, 1862-1869, t. III, p. 272-276, notice « Tilly ».
M. Charpillon et Abbé A. Caresme, Dictionnaire historique de toutes les communes de l’Eure, Évreux, 1867-1868, p. 916-918, notice « Tilly », réimpressions Paris, 1966, 1992).
Répertoire des abbayes et prieurés de l’Eure, Évreux, 1983, p. 130.
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