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Une œuvre de transition

L’église de Saint-Martin de Ligueil fait partie de ces petites églises que l’histoire et le hasard ont dotées d’un mobilier riche et divers. Parmi les œuvres qu’elle renferme, sommeille un christ de chaire en bois, création populaire de belle facture, bouleversante par son expressivité et sa forte présence. Ce Christ de chaire, objet destiné à orner le mur de la nef, face à la chaire à prêcher, fut probablement réalisé par un sculpteur local, au XVIe ou au XVIIe siècle, peut- être d’après un modèle plus ancien. Il est assez représentatif d’une production locale, qui maintint tardivement certaines caractéristiques artistiques médiévales tout en affirmant une réelle sensibilité aux nouveautés de la Renaissance. Effigie souffrante au corps amaigri et ensanglanté, aux membres inférieurs allongés, ce Christ vivant, qui jette un regard éperdu vers le Créateur, reste marqué par un sens du pathétique profondément médiéval. Mais en même temps, il s’est redressé et affiche un modelé relativement naturaliste où l’on sent poindre la volonté du sculpteur de décrire l’anatomie avec exactitude, une ambition qui s’est développée en France au XVIe siècle sous l’influence de l’art italien. Œuvre de transition, cet objet étonne par la fusion des contraires qu’elle opère, mêlant avec liberté un certain réalisme outrancier et la douceur caractéristique des modèles tourangeaux du XVIe siècle.

Une restauration pleine de sens

Ce Christ de chaire en bois est aujourd’hui très fragile et abîmé. Son bras gauche a été brisé et refixé à l’aide d’une plaque de métal, mais il reste mobile et menace de se désolidariser à tout moment. L’œuvre, lacunaire au niveau des pieds et des mains, a par ailleurs subi des attaques d’insectes xylophages qui ont laissé des traces nombreuses. Elle conserve sa polychromie, mais seule une étude pourra déterminer s’il s’agit de la polychromie originelle et nous renseigner sur d’autres aspects importants de l’objet (telle la datation) ou plus anecdotiques (telle la nature du matériau utilisé pour réaliser la couronne d’épines). Au-delà de la seule restauration du Christ, il faudra songer à la fabrication d’une nouvelle croix si on souhaite sa remise en place dans la nef. La restauration de cette œuvre s’inscrit donc dans un projet global et cohérent qui, porteur d’une forte valeur historique pour la commune de Ligueil, a déjà remporté l’adhésion d’un certain nombre d’habitants et des entreprises locales puisque plus de la moitié de la somme nécessaire à la restauration a été réunie.

La belle endormie

Reléguée sous les combles de la sacristie depuis plus de deux siècles, cette sculpture a ainsi pu échapper au vandalisme de 1794. Nous ne disposons malheureusement d’aucune information historique précise sur cette œuvre, mais nous pouvons supposer qu’elle fut jugée trop fruste et remplacée par un crucifix plus moderne au XVIIIème s. Néanmoins une réparation ancienne dans le dos témoigne d’un emploi prolongé par le passé (sinon, pourquoi l’avoir réparée ?) et nécessairement d’un certain attachement de la communauté à l’objet. Représentative de ces « œuvres rustiques qui révèlent la mentalité des humbles artistes qui les ont sculptées dans le bois » , cette œuvre riche de sens bien qu’anonyme, pose la question de la conservation et de la restauration des objets d’art populaire.

Bibliographie

Paul Thoby, Le Crucifix des origines au Concile de Trente , Nantes, 1959 Michel Bourderioux, « Crucifix de chaire en Touraine » in Bulletin de la Société archéologique de Touraine, Tome XXXV, année 1968

Projet mené par Marie-Garance Girard, étudiante de l’École du Louvre

Le projet en images

Le Christ avant et après restauration